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A.Lamarque : 30/06/2021



Le crowdfunding pour sauver une écurie : le pari fou de Caterham


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Survivre en F1 nécessite des reins solides financièrement d’autant plus quand les résultats en piste n'arrivent pas. Les déboires de nombreuses écuries tout au long de l’histoire de la F1 en témoignent. Une période récente illustre parfaitement ces difficultés. Elle commence avec la saison 2010 de Formule 1 et l'arrivée de trois nouvelles écuries : HRT, Lotus F1 Racing (futur Caterham F1 Team) et Virgin Racing (futur Marussia puis Manor). Ces projets auront des destins chaotiques.

HRT ne survit que deux saisons. Marussia est placée en liquidation judiciaire en 2014 suivi du dépôt de bilan la même année. De son côté, Lotus F1 Racing devenu Caterham est aussi en redressement judiciaire suite aux échecs sportifs (mauvais résultats en piste en raison de voitures non performantes) et stratégique (mise en place d’une nouvelle usine coûteuse qui impacte l’amélioration de la voiture alors que l’écurie en avait besoin). Sa situation est d’autant plus catastrophique qu’elle a disparu des circuits depuis déjà deux courses quand elle décide de se lancer un pari fou : revenir pour la dernière manche de la saison. Toutefois, l'écurie n’a plus d’argent. Elle décide donc de se tourner vers le crowdfunding (financement participatif) alors en plein essor pour financer ce projet. Le crowdfunding est défini par le Larousse par la mise en commun d'apports financiers (dons, prêts, investissements) dans le but de financer des projets généralement via Internet.

Le crowdfunding est lancé sur la plateforme Crowdcube en novembre 2014. La somme demandée est colossale. En effet, l’écurie a besoin de plus de 2 ,3 millions de pounds soit près de 3 millions d’euros pour courir la dernière manche du championnat. La campagne est classique mais les contreparties sont très attractives pour tout fan de formule 1 : d’une simple casquette à un dîner avec un pilote de l’écurie en passant par un accès VIP à ce week-end de course ou encore la possibilité d’acquérir un aileron.

Les critiques face à ce projet inédit sont acerbes. Elles proviennent en plus de membres éminents du paddock de formule 1 comme Christian Horner (patron de Redbull) : "Le concept est mauvais et ne devrait pas être autorisé. Il est important que la Formule 1 ne lave pas son linge sale en public.” ou Martin Brundle (ancien pilote et commentateur anglais) qui estime qu’il y a suffisamment d'argent dans le sport pour ne pas solliciter les fans. Le plus incisif est Bernie Ecclestone. Le grand patron (il ne l’est plus depuis 2017) de la Formule 1 estime que ce choix est un désastre pour le sport. Il n’apprécie surtout pas le fait de demander au public de financer une écurie.

Finalement la campagne est un succès. En effet, elle aura permis de participer à la dernière course de la saison. Toutefois, selon The Independent, l’écurie serait bénéficiaire de 75 000 £. Ce point pose un problème éthique car l’écurie avait, en parallèle du succès de ce financement, licencié ses salariés après plusieurs semaines d’impayés. La direction se défend en invoquant le timing de la nomination du dirigeant par intérim et de la possibilité de faciliter le rachat par cette action. Il est clair que la situation à ce moment-là était très confuse entre la survie de l’écurie en jeu, la recherche de repreneur et la gestion de la campagne de crowdfunding. Il est donc difficile d’y saisir les véritables intentions.

Ce succès permet d’attirer les repreneurs potentiels espérés sans que cela ne se concrétise. L’aventure Caterham s’arrête définitivement à l'issue de la saison 2014. Cette histoire inédite révèle toute la difficulté de gérer une écurie de Formule 1. Les organisateurs du championnat veulent intégrer une nouvelle écurie au championnat dans les années à venir. Quel sera son destin ?



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